mardi, mars 19, 2024
Les Manuscrits de la Mémoire Morte

Les Manuscrits de la Mémoire Morte

Dans un monde à l'histoire oubliée, les morts marchent et les civilisations s'égarent.

Les Bordurins

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La culture bordurine, à l’instar de la culture unakisii, est originaire des montagnes. A l’est de la chaîne Piqueciel s’élève les Monts du Bord et cette région, même du temps de l’Empire d’Asten, étaient déjà connue sous ce nom, et les gens qui s’y étaient installés, reconnus comme des membres un peu à part dans l’Empire. Les bordurins sont vus par les aodissiens comme des érudits mais en tant que tels héritent d’une très longue tradition de penseurs et de philosophes.

Origine

Les Monts du Bord étaient ainsi appelé dans l’Empire d’Asten en raison de leur éloignement d’Astendar (la capitale de l’Empire) et de la frontière naturelle qu’ils formaient avec la région actuelle d’Aodissia autrefois appelée Astareth, terre de naissance de la plus puissante compagnie commerciale de l’Empire. Dans cette large ceinture montagneuse s’était isolé un groupuscule d’intellectuel de l’Empire désireux de se détacher du mode de vie matérialiste imposé par la croissance impériale, s’était retranché sur la façade est de la chaîne (côté Empire donc) pour y fonder un monastère. Moniales et moines y prospérèrent vivant en parfaite autarcie et employant leur temps libre à développer diverses philosophies et idéologies. Avant que l’Empire ne commence à décliner, la communauté avait atteint une dimension telle que plusieurs autres monastères et extensions de ceux-ci avaient transformés la région en divers petits villages autonomes perchés dans la montagne et conduits par la seule nécessité de cultiver ou élever sa subsistance et de penser. Il arrivait fréquemment que des impériaux, las de vivre selon les rythmes et les besoins d’une culture de plus en plus policée, émigrent vers les Bords (une abréviation pour les Monts du Bord utilisée à l’époque) pour changer totalement de vie. La région étant elle-même difficile d’accès et peu intéressante vis-à-vis des problématiques démographiques de l’Empire, l’Etat laissa ce havre de paix se développer sans s’en préoccuper davantage.

Lorsque le putsch eu lieu et qu’Asten s’engagea dans une guerre d’expansion contre les dudins, beaucoup craignirent que l’Empire ait amorcé sa chute. Désireux de préserver le savoir, de nombreux érudits fuirent le centre impériale, des charriots d’ouvrages sous les bras, et se réfugièrent dans les Bords, adoptant le mode de vie des bordurins et modifiant petit à petit la vocation initiale de ceux-ci. Les Bordurins survécurent à la chute d’Asten, mais vécurent des années difficiles après l’ultimatum des Disciples d’Aod. Des réfugiés affluèrent de tout Alméra pour rejoindre la communautés des bordurins et ces derniers les rejetèrent arguant que leur mode de vie n’était pas compatible. Ils conseillèrent simplement les errants de faire comme eux, de trouver une terre et de s’installer et de créer quelque chose de nouveau.

Toutefois, des groupes militarisés d’anciens impériaux n’acceptèrent pas qu’on leur ferma la porte au nez et prirent d’assaut des villages bordurins pour les investir. Ces derniers n’avaient aucune capacité militaire et fuirent de villages en villages, s’enfonçant un peu plus dans les Bords, sauvegardant ce qu’ils pouvaient de leurs précieux livres. C’est un Disciple d’Aod, Salmek, qui mit fin à ce conflit en éliminant sans pitié tous les impériaux (y compris leurs femmes et enfants). Les bordurins ne revinrent pas dans les villages vidés leurs présences. Caché au cœur de la chaîne montagneuse, ils s’étendirent sur sa façade ouest.

Des années plus tard, Hurak, l’Aodis fils de Salmek, vint trouver les bordurins pour leur confier une mission. Il souhaitait que ceux-ci consacre une part de leur ressources à la récupération des connaissances impériales perdues et qu’ils construisent une grande bibliothèque où ils pourraient tout stocker en attendant des jours meilleurs. Par respect pour Salmek qui les avait libéré de l’oppression des impériaux et comprenant l’importance d’une telle tâche, les bordurins s’attelèrent à la tâche. Hurak les aida à l’installer sur les flancs ouest des Monts du Bord ou la Grande Bibliothèque devint le cœur de la cité d’Urakis. Dans le même temps de nombreuses caravanes bordurines furent organisées pour sillonner les terres de l’Empire à la recherche de tout ce qui pouvait être récupéré. L’ensemble de ce projet fut conduit durant 50 ans et Hurak s’y consacra pleinement, embrassant la philosophie des bordurins, à moins que ce ne fut l’inverse…

Lorsqu’Uyadan survint bien après qu’Urakis se soit développée comme la plus importante ville bibliothèque d’Aodissia, les bordurins furent largement mis à contribution pour diffuser le savoir conservé à Urakis. Elle devint un temps le coeur vibrant de la Guilde du Savoir avant que le siège ne soit déménagé à la capitale. Même si les principaux ouvrage de la Grande Bibliothèque d’Urakis ont largement été recopié et convoyé vers les autres cités, l’immense complexe demeure le plus important et le plus riche de tout Almera (au dire des Aodis qui connaissent le territoire dudin et le domaine elfin), contenant des millions d’ouvrages dont une large partie est constitué d’exemplaire unique que les copistes n’ont pas encore eu le temps de traiter.

Religion

Les bordurins cultivent des croyances philosophiques mais aucune croyance religieuse. Ils admettent l’existence des forces occultes, des esprits ou des arcanes, et sont même pour certains tout à fait apte à manipuler toutes les formes de magie, mais ils en ont tous une approche intellectuelle, philosophique ou scientifique. Cette particularité, dont ils ne se cachent pas, a fortement influencé la culture aodissienne, puisqu’il apparaissait que la ferveur religieuse, la foi inconditionnelle, n’était pas un facteur essentiel à la communion avec l’esprit divin. Toutefois, d’après les bordurins eux-mêmes, leur pratique de la magie divine n’est pas toujours en relation avec une quelconque croyance divine.

Des convictions, tous les bordurins en ont, et c’est ce qui, selon eux, permet d’acquérir le don de la magie divine, qui est une croyance pure et intrinsèque envers une somme de concepts et de notion philosophique formant un dogme tout à fait atypique. Leurs « dieux » n’ont techniquement aucune personnalité, et ne sont pas des entités pensantes, ni même des entités à proprement parler. Mais force est de constater que leur conviction envers ces notions fondatrices est assimilable à une foi et rapporte les mêmes bénéfices.

Au fil du temps, les pratiques divines des bordurins se sont axées autour de trois approches différentes assimilables à des dogmes et sur lesquelles la conviction est si forte qu’elle attire le potentiel de la magie divine sans qu’il soit véritablement possible d’affirmer s’il est d’essence purement divine ou purement philosophique.

  • Le fondement : la fondation de l’univers repose sur une suite événementielle identifiable dans laquelle tous les éléments, tous les acteurs, y compris les puissances dites divines, sont les pièces d’une mécanique d’une complexité impossible à embrasser pour les esprits mortels. La vérité essentielle qui se cache dans ce schéma est qu’en tant qu’être vivant, tout individu incarne l’un de ces rouages et dispose de la capacité intrinsèque à agir sur l’univers. De la conviction sur le rôle qu’il joue et la place qu’il occupe dépend sa force et son influence sur le cours des choses. L’univers se pliera à ses désirs lorsqu’il sera convaincu que son désir est en phase totale avec l’univers, au point qu’il n’existera plus de différence entre ce qu’il est et ce à quoi il sert dans la grande mécanique universelle. C’est la conviction la plus répandue chez les bordurins.
  • Le nombre : le nombre est la l’explication et l’illustration de ce qui construit l’univers. Le nombre est partout. Et la manipulation des nombres est révélatrice des schémas et des échelles qui permettent de comprendre et d’expliquer le monde. L’humain n’a pas conscience que sa vie peut se mettre en équation, parfois complexe, parfois simple, dans lesquelles les nombres sont à la fois source et finalité. Une courbe peut illustrer un fait, une opération mathématique révéler un destin, et pour ceux qui peuvent distinguer dans les arcanes du chiffre, la manière dont le nombre décrit telle ou telle expérience du monde, il est possible de faire du nombre l’élément déclencheur de l’acte. La croyance dans l’intervention du nombre au sein des structures de la réalité est le début de la capacité à façonner la réalité au travers du nombre. Le nombre est considéré, même chez les bordurins, comme l’approche fondamentale la plus absconse.
  • La force : Le fonctionnement de l’univers repose sur l’interaction de forces visibles ou invisibles qui agissent et interagissent. L’énergie n’est jamais que l’expression d’une force qui évolue. La matière elle-même est une force. Mais au sein de ces forces qui s’interconnectent, il en est une plus puissante que les autres, c’est l’âme. La force essentielle, aussi appelée la force d’âme est une force qui possède le plus grand pouvoir qui soit sur les autres. Prendre conscience du potentiel de sa propre âme permet de s’approprier ce pouvoir. Tout ce qui contribue à grandir l’être contribue à grandir l’âme et par conséquent, le pouvoir qui en découle. Cette philosophie mène à un degré de conscience qui permet de se rendre compte de la façon dont les forces s’influencent les unes les autres et des effets que la grandeur d’âme suscite sur elles. Ceux qui maîtrise cet état d’éveil essentiel transcendent leur propre nature. Si les sages bordurins adepte de la force l’enseignent par la voie de la paix ultime, il est reconnu que l’enseignement peut être perverti et l’éveil atteint par des voies moins honorables, l’essentiel étant d’identifier et de s’accomplir dans sa nature profonde sans jamais se trahir. Si cette philosophie fondamentale est plus facile à cerner que celle du nombre, les Maîtres Éveillés qui ont atteint le stade ultime de ce développement spirituel sont très peu nombreux.

Chez les bordurins pure souche, ces voies et les enseignements basiques de la philosophie sont diffusés dès l’enfance. Les jeunes bordurins savent qu’il existe au moins ça avant de s’intéresser à d’autres formes de croyances qui sont alors abordées par l’esprit avant d’être adoptées par le cœur si jamais une vocation est découverte. Les bordurins poussent les leur à s’affranchir au maximum du contexte socio-culturel, à embrasser l’ensemble des possibilités, avant de choisir sa voie comme produit d’une réflexion parfaitement mesurée.

Us et coutume

Les bordurins cultivent à l’extrême la libre pensée. Même si les ancêtres de cette culture se sont détachés d’un contexte socio-culturel au lourd passif, leurs efforts pour recommencer à zéro les a conduit à presque tout remettre en question, et pour certains, décédés très rapidement, y compris les choses essentielles (manger, dormir, etc.). Les bordurins qui ont hérité de ces expériences sont restés globalement convaincu que chacun est libre de se réaliser de la manière qu’il souhaite. Toutefois, malgré la finalité de leur existence, les bordurins sont partagés sur la méthode. Une tranche peu importante de la population estime que l’influence est néfaste et que la culture, l’histoire, l’éducation (même minimaliste) sont des freins à la découverte de la voie. La majorité, en revanche, s’appuie sur l’idée d’une éducation et d’un enseignement aussi riches et objectifs que possible pour tirer partie des expériences passées et trouver sa voie d’avenir propre.

Les enfants bordurins sont généralement éduqués au travers de l’une ou l’autre méthode en fonction des convictions de la famille. Ce peuple n’a jamais cherché à démontrer la supériorité d’un modèle éducatif par rapport à l’autre, attendu que cela aurait été contre la philosophie bordurine.

La première voie s’appelle « le dénuement » et procède à un isolement rapide de l’enfant que l’on envoie dans l’un des antiques monastères des Monts du Bord restés en activité et consacrés à la philosophie de la force. Comme expliqué plus haut, cela ne concerne qu’une tranche peu importante de la population. Dans la voie du dénuement, on ne quitte le monastère qu’à l’âge de 15 ans. si l’on part avant, dès le début de l’adolescence la plupart du temps, c’est pour changer de voie. Quand on y reste après 15 ans, c’est souvent parce que l’on souhaite chercher l’éveil et que l’on compte soi-même devenir un Maître Éveillé. Une fois l’Eveil atteint, le moine reste généralement au monastère, mais certains décident de sortir de leur isolement et de vivre une vie différente.

La seconde voie s’appelle « l’étude » et donne accès aux écoles d’Urakis durant l’enfance et à « l’Université » dès l’adolescence. Les autres cultures d’Aodissia peuvent normalement accéder à l’Université mais ce n’est pas dans le même esprit que les bordurins qui ont créé ce cursus d’enseignement pour parfaire le plus complètement possible les connaissances de leurs jeunes. Ce modèle éducatif à servie de base au développement de la Guilde du Savoir. Il n’existe quasiment plus de distinction aujourd’hui entre l’éducation des enfants à Urakis et dans le reste d’Aodissia. En revanche, Urakis est la seule à proposer le cursus universitaire. A la capitale, il existe un cursus éducatif complémentaire à l’école, c’est le professorat et il est entièrement entre les mains de la Guilde du Savoir pour la formation des futurs enseignants.

Organisation sociale

Les bordurins ont adopté le système politique conçu par les Aodis, le jugeant efficace et juste. Ils l’ont appliqué à la ville d’Urakis. Toutefois, pour ce qui est de la scolarité, ils ont gardé leurs prérogatives et la vie dans les monastères des Monts du Bord est entièrement autarcique et indépendante de toute forme d’organisation et politique aodissienne. Il n’est d’ailleurs pas rare que la sentence de bannissement poussent les bannis à chercher un refuge dans l’un de ces monastères pour y embrasser une vie totalement différente dans la voie du dénuement et ce même s’ils n’atteignent jamais l’éveil.

En dehors de ça le conseil de la cité et les institutions aodissiennes fonctionnent à Urakis comme partout ailleurs, tout comme les différents corps de métiers. Les bordurins pure souche réprésentent environs 30000 âmes à Urakis même, et environ 20000 de plus dans la région. Le reste de la population locale est essentiellement aodissienne. Mais sur le plan culturel la différence n’est pas du tout évidente. On a souvent tendance à dire qu’un urakisii est un bordurin ou inversement. Leur degré d’éducation est même suffisamment supérieur à celui des autres cités qu’on les reconnaît pour la sophistication de leurs connaissances. Cela étant, n’importe qui peut bénéficier des enseignements du « dénuement » ou de « l’étude » si bien qu’avoir bénéficié du cursus éducatif bordurin n’a aucun rapport direct avec la culture d’origine.

A noter que l’église d’Aod implantée à Urakis n’accueille qu’une faible poignée de bordurins en son sein, tout comme les Chevaliers du Destin en garnison dans la région. Et ces bordurins se livrent finalement à leur propre culte pour servir ces institutions. C’est l’objet d’une polémique récurrente qui veut que les croyances des bordurins ne défendent pas les principes fondateurs de l’église d’Aod ou de la chevalerie du destin, des conflits systématiquement entérinés de la même façon par les Aodis : l’acceptation. S’il est de notoriété publique dans la région d’Urakis que des bordurins sont chevalier du destin armé de leur propre croyances philosophiques, c’est un fait qui se répands peu ailleurs, dans la mesure où les bordurins ne sont pas les seuls dans ce cas là. De son côté l’église d’Aod est un peu plus fermée à l’idée, n’arrivant pas à concilier l’enseignement principal du culte d’Aod avec celles des bordurins.